Certes, quand j'imagine l'homme tout nud (ouy en ce sexe qui semble avoir plus de part à la beauté), ses tares, sa subjection naturelle et ses imperfections, je trouve que nous avons eu plus de raison que nul autre animal de nous couvrir.
MICHEL DE MONTAIGNE – Livre II – Apologie de Raimond Sebond p. 151
Toutes les guerres sont civiles; car c'est toujours l'homme contre l'homme qui répand son propre sang, qui déchire ses propres entrailles.
FÉNELON - Dialogues des morts, Socrate et Alcibiade.
Il est indifférent que ce soient les chrétiens ou les musulmans qui souffrent, il n'y a que l'homme qui soit digne d'intéresser l'homme.
G.-T. GUILLAUME RAYNAL - Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes, (1770), xi, 9
La liberté est la propriété de soi; on distingue trois sortes de libertés: la liberté naturelle, la liberté civile, la liberté politique; c'est-à-dire la liberté de l'homme, celle du citoyen et celle d'un peuple.
G.-T. GUILLAUME RAYNAL - Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes, (1770), XI, xxiv
[...] il n'y a point d'hommes dans le monde. J'ai vu dans ma vie des Français, des Italiens, des Russes; je sais même grâce à Montesquieu qu'on peut être Persan; mais quant à l'homme je déclare ne l'avoir jamais rencontré de ma vie, s'il existe c'est bien à mon insu.
JOSEPH DE MAISTRE - Considérations sur la France, vi, p. 88
Appliquez le Contrat social, si bon vous semble, mais ne l'appliquez qu'aux hommes pour lesquels on l'a fabriqué. Ce sont des hommes abstraits, qui ne sont d'aucun siècle et d'aucun pays, pures entités écloses sous la baguette métaphysique. En effet, on les a formés en retranchant expressément toutes les différences qui séparent un homme d'un autre, un Français d'un Papou, un Anglais moderne d'un Breton contemporain de César, et l'on n'a gardé que la portion commune.
HYPPOLITE TAINE - Les Origines de la France contemporaine, i, t. III, p. 217
En vérité, je crois que l’homme, et par l’homme j’entends aussi la femme, est le plus vilain animal qui soit sur terre.
THÉOPHILE GAUTIER – Mademoiselle de Maupin – Chapitre Deuxième - p. 78
Si j'avais été au concile de Trente quand s'y agita cette importante question, à savoir si la femme est un homme, j'aurais assurément opiné pour la négative.
THÉOPHILE GAUTIER – Mademoiselle de Maupin – IX
L'homme est constitué par la société et impossible même à imaginer hors du milieu qui lui a donné son âme, mais il est aussi un individu, qu'on ne saurait entièrement expliquer par des influences sociales.
JACQUES CHARDONNE - L'Amour du prochain, p. 16.
L'homme est un tout indivisible d'une extrême complexité. Il est impossible d'avoir de lui une conception simple. Il n'existe pas de méthode capable de le saisir à la fois dans son ensemble, ses parties et ses relations avec le monde extérieur. Son étude doit être abordée par des techniques variées. Elle utilise plusieurs sciences distinctes.
ALEXIS CARREL - L'Homme, cet inconnu, p. 2
Vivre aux humains est incertain
VILLON – Le lais – Strophe 8, 61 (Recl. p. 42) (écrit vers 1455)
Plus juste cause de douleur naître ne peut entre les humains
RABELAIS – Gargantua – Ch. 31 (p. 79) (écrit vers 1534)
Donc des humains sont les lassés esprits
De doux repos et de sommeil épris.
LOUISE LABÉ – Claire Vénus..., sonnet p. 113
Hélas! est-il possible que une chose cachée aux œils de tous les humains ait été révélée à madame la duchesse?
MARGUERITE DE NAVARE – 70° Conte (p. 128) (paru en 1588 posth.)
A quoy faire ces pointes eslevées de la philosophie sur lesquelles aucun estre humain ne se peut rassoir, et ces regles qui excedent nostre usage et nostre force?
MICHEL DE MONTAIGNE – Livre III, 9 – Vanité p. 202 (paru vers 1590)
La faiblesse aux humains n’est que trop naturelle
RACINE – Phèdre – Acte IV, Sc. 6 (p. 84) (paru en 1677)
Bien des gens y sont pris. Ce n’est pas aux hérons
Que je parle; écoutez, humains, un autre conte.
JEAN DE LA FONTAINE – Le héron & la fille VII, 4 et 5 (paru en 1694)
C’est ainsi qu’aux flatteurs on doit partout se prendre
Des vices où l’on voit les humains se répandre
MOLIÉRE – Le Misanthrope – Acte II, Scène 4 – p.68
Mon premier mouvement fut un sentiment de joie de me retrouver parmi des humains où je m’étais cru totalement seul.
JEAN-JACQUES ROUSSEAU – 7° promenade p. 113 (paru en 1782, posth.)
[…]; mais quand les regards s’élevaient, des rochers suspendus semblaient, comme la destinée, menacer les humains au milieu de leurs plaisirs.
Mme DE STAËL – De L’Allemagne - La fête d’interlaken I, p. 153 (paru en 1813)
Et non seulement, continua l’apothicaire, les humains sont en butte à ces anomalies, mais encore les animaux.
GUSTAVE FLAUBERT – Madame Bovary II, 13 p. 218 (paru en 1857)
Je me rendis compte que, en dehors de ceux de sa parenté, les humains excitaient d’autant plus sa pitié par leurs malheurs, qu’ils vivaient éloignés d’elle.
MARCEL PROUST – Du côté de chez Swann p. 121 (paru en 1913)
Ma pauvre grand-mère entrait, priait ardemment son mari de ne pas goûter au cognac ; il se fâchait, buvait tout de même sa gorgée, et ma grand-mère repartait, triste, découragée, souriante pourtant, car elle était si humble de cœur et si douce que sa tendresse pour les autres et le peu de cas qu’elle faisait de sa propre personne et de ses souffrances se conciliaient dans son regard en un sourire où, contrairement à ce qu’on voit dans le visage de beaucoup d’humains, il n’y avait d’ironie que pour elle-même, et pour nous tous comme un baiser de ses yeux qui ne pouvaient voir ceux qu’elle chérissait sans les caresser passionnément du regard.
(Meine arme Großmutter ging also ins Haus und beschwor ihren Mann, keinen Kognak zu trinken; er wurde böse, trank trotzdem sein Gläschen, und meine Großmutter ging traurig, entmutigt und gleichwohl lächelnd davon, denn sie war so demütigen Herzens und so gutartig, daß ihre Zärtlichkeit für die anderen und die geringe Wichtigkeit, die sie von ihrer eigenen Person und ihren Leiden machte, sich in ihrem Blick in einem Lächeln versöhnten, das ganz im Gegensatz zu dem, was man auf den meisten Gesichtern liest, Ironie nur gegen sich selbst enthielt; uns alle streiften ihre Augen wie mit einem Kuß, denn sie konnte ihre Lieben nicht anschauen, ohne sie leidenschaftlich mit dem Blick zu streicheln.)
(My poor grandmother would come in and beg and implore her husband not to taste the brandy; and he would become annoyed and swallow his few drops all the same, and she would go out again sad and discouraged, but still smiling, for she was so humble and so sweet that her gentleness towards others, and her continual subordination of herself and of her own troubles, appeared on her face blended in a smile which, unlike those seen on the majority of human faces, had no trace in it of irony, save for herself, while for all of us kisses seemed to spring from her eyes, which could not look upon those she loved without yearning to bestow upon them passionate caresses.)
MARCEL PROUST – Du côté de chez Swann p. 12 (paru en 1913)
Du moins dans ces réveils tels que je viens de les décrire, et qui étaient la plupart du temps les miens quand j’avais dîné la veille à la Raspelière, tout se passait comme s’il en était ainsi, et je peux en témoigner, moi l’étrange humain, qui en attendant que la mort le délivre, vit les volets clos, ne sait rien du monde, reste immobile comme un hibou et comme celui-ci, ne voit un peu clair que dans les ténèbres.
MARCEL PROUST – Sodome et Gomorrhe – Tome second p. 150
Des réduits, des sous-sols, des caves, des égouts, ils montaient en longues files titubantes pour venir vaciller à la lumière, tourner sur eux-mêmes et mourir près des humains.
ALBERT CAMUS – La peste (paru en 1947)
[...], et les douaniers eux-mêmes à Modane vous apparaîtront comme des humains.
MICHEL BUTOR - La modification p. 128
Une hiène ramenée d’Afrique allait et venait dans une énorme cage, suivant de ses yeux méfiants les gestes des humains, et jappant sauvagement toute la nuit.
MARGUERITE YOURCENAR – Souvenirs pieux p. 151 (paru en 1974)
Je ne peux quitter les enfants sans dire un mot des animaux domestiques, qui vivent en relation très intimes avec eux et sont eux-mêmes traités comme des enfants; ils participent aux repas, reçoivent les mêmes témoignages de tendresse ou d’intérêt – épouillage, jeux, conversation, caresses – que les humains.
(Ich kann mich von den Kindern nicht trennen, ohne ein Wort über die Haustiere zu sagen, mit denen die Eingeborenen in engstem Kontakt leben und die auch wie Kinder behandelt werden : sie nehmen an den Malzeiten teil, erhalten die selben Beweise von Zärtlichkeit und Interesse – Entlausung, Spiele, Gespräche, Liebkosungen – wie die Menschen.)
CLAUDE LÉVI-STRAUSS – Tristes tropiques – p. 334
Quelle puissance fallait-il pour éveiller le genre humain d'un si prodigieux assoupissement ?
JACQUES BÉNIGNE BOSSUET - Hist. nat. de l'homme, ii, 12.
La guerre est un mal qui déshonore le genre humain […]
FÉNÉLON(François de Salignac de La Mothe) Dialogues des morts, Socrate et Alcibiade.
Si je savais quelque chose qui me fût utile, et qui fût préjudiciable à ma famille, je le rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose utile à ma famille, et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l'oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l'Europe et au genre humain, je le regarderais comme un crime.
MONTESQUIEU - Pensées diverses, Portrait de Montesquieu par lui-même.
Les noms de ces bienfaiteurs du genre humain [les inventeurs des arts mécaniques] sont presque tous inconnus tandis que l'histoire de ses destructeurs, c'est-à-dire des conquérants n'est ignorée de personne.
D'ALEMBERT - Disc. préliminaire à l'Encyclopédie, in Pougens.
Les citoyens de cette république idéale, dégagée, pour la plupart, de toute espèce de rapports avec les affaires publiques et particulières, travaillent dans l'obscurité comme les mineurs, et, placés comme eux au milieu des trésors ensevelis, ils exploitent en silence les richesses intellectuelles du genre humain.
Mme DE STAËL - De l'Allemagne, I, xiii.
[...] et je regarderais comme un grand malheur pour le genre humain que la liberté dût en tous lieux se produire sous les mêmes traits.
ALEXIS DE TOCQUEVILLE – De la démocratie en Amérique – Tome premier – Deuxième partie – Chapitre neuf – p. 465
Le point de départ comme le point d'arrivée de toutes ses pensées était la haine de la loi humaine; cette haine qui, si elle n'est arrêtée dans son développement par quelque incident providentiel, devient, dans un temps donné, la haine de la société, puis la haine du genre humain, puis la haine de la création, et se traduit par un vague et incessant et brutal désir de nuire, n'importe à qui, à un être vivant quelconque.
VICTOR HUGO - Les Misérables, I, ii, vii.
Longtemps il avait été entendu qu'industrialisme et machinisme feraient le bonheur du genre humain.
HENRI BERGSON – Les Deux Sources de la morale et de la religion – p. 361
[...] quelques-unes de leurs pensées [des grands écrivains] sont tout à fait mortes et il y en a d'autres que le genre humain tout entier a reprises à son compte et que nous tenons pour des lieux communs.
JEAN-PAUL SARTRE - Situations II, p. 80
Telle est donc la condition humaine, que souhaiter la grandeur de son pays c'est souhaiter du mal à ses voisins. Celui qui voudrait que sa patrie ne fût jamais ni plus grande, ni plus petite, ni plus riche, ni plus pauvre, serait le citoyen de l'univers.
VOLTAIRE - Dict. philosophique, Patrie.
Lorsqu'un grand changement s'opère dans la condition humaine, il amène par degrés un changement correspondant dans les conceptions humaines.
HIPPOLYTE TAINE - Philosophie de l'art., t. II, iii, ii, ii, p. 22
En effet, le médecin n'est pas le médecin des êtres vivants en général, pas même le médecin du genre humain, mais bien le médecin de l'individu humain, et de plus le médecin d'un individu dans certaines conditions morbides qui lui sont spéciales et qui constituent ce qu'on a appelé son idiosyncrasie.
CLAUDE BERNARD - Introd. à la médecine expérimentale, p. 139
Une culture générale vraiment digne de ce nom devra donc toujours comporter, en dehors de l'acquisition des connaissances scientifiques, une réflexion approfondie sur la complexité de la personne humaine et sur les divers aspects qu'elle présente, une initiation aussi à l'art de sentir et de vouloir. C'est là l'essence de l'humanisme et la signification même de ce mot. Un humanisme moderne, même s'il doit devenir tout à fait indépendant de la culture gréco-latine, devra conserver ce caractère et pour cette raison il devra toujours réserver une place importante aux études littéraires.
LOUIS DE BROGLIE - La Culture scientifique, in Nouvelles Perspectives en microphysique, p. 249
[...] l'occupation de la France fut un immense phénomène social qui intéressa trente-cinq millions d'êtres humains. Comment parler en leur nom à tous? Les petites villes, les grands centres industriels, les campagnes ont connu des sorts différents. Tel village n'a jamais vu d'Allemands, dans tel autre ils ont cantonné pendant quatre ans.
JEAN-PAUL SARTRE - Situations III, p. 17
Chez les nations où règne le dogme de la souveraineté du peuple, chaque individu forme une portion égale du souverain, et participe également au gouvernement de l’État.
Chaque individu est donc censé aussi éclairé, aussi vertueux, aussi fort qu’aucun autre de ses semblables.
ALEXIS DE TOCQUEVILLE – De la démocratie en Amérique – Première partie / Chapitre cinq – p. 118
L'individu humain garde sa personnalité dans le flux des processus organiques et mentaux qui constituent sa vie.
ALEXIS CARREL - L'Homme, cet inconnu, p. 192